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  • Les néoconservateurs, une élite impériale...

    Les éditions Géopolitique profonde viennent de publier un court essai de Laurent Ozon intitulé Les néoconservateurs, une élite impériale.

    Essayiste et analyste politique, tenant d'une écologie localiste et identitaire, premier promoteur de l'idée de remigration, Laurent Ozon est déjà l'auteur de l'excellent essai intitulé France, années décisives (Bios, 2015).

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    " Vous avez forcément déjà entendu le vocable « néocon » dans une conférence, un entretien, un article ou un livre au cours de ces dernières années. Il est de ces mots qui se répandent d'autant plus facilement que nul n'en possède une définition exacte. Celui-ci sert souvent à désigner des acteurs aux contours mal déterminés, exerçant des pouvoirs mal définis pour des objectifs largement incompréhensibles, même si les commentateurs politiques s'accordent sur le fait qu'il s'agit là d'un réseau de pouvoir incitant les États-Unis à une politique de leadership mondial assumée et brutale.

    Depuis le début du second mandat de Donald J. Trump et ses tentatives maladroites pour mettre fin au conflit en Ukraine, on constate que le réseau néocon n'est pas seulement actif à partir des États-Unis et qu'il exerce une influence lourde sur la politique de l'Union européenne et de la France. Et plus troublant encore, on observe qu'il semble capable, à partir de là, de contester la politique du gouvernement légalement élu par les citoyens des États-Unis, lorsqu'il juge cela nécessaire.

    Il est temps d'éclaircir ce qui pousse les peuples européens à consentir à une politique ayant détruit de nombreux États du Proche et du Moyen-Orient, fait des millions de morts et jeté près de 40 millions de réfugiés sur les routes et dans nos pays. Il est temps de comprendre la nature de ces forces qui nous poussent à une guerre contre la Russie, ou à subir sans réaction, une politique de prédation et d'humiliation au profit des États-Unis d'Amérique depuis des décennies.

    Par cet essai, Laurent Ozon espère contribuer à l'ouverture d'un débat public sur les « néoconservateurs », à la lumière de leur histoire, de leurs intellectuels clés et des effets de leurs actions. Un débat sans lequel nous risquons fort de continuer à subir des politiques, des réseaux et des intérêts étrangers qui nous détruisent."

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  • L’Europe sans bouclier : comment les États-Unis exploitent sa faiblesse géopolitique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Diego Marenaci, cueilli sur Euro-Synergies et consacré à la faiblesse géopolitique de l'Europe. Journaliste indépendant, Diego Marenaci est diplômé en Sciences Politiques et Relations Internationales.

     

    Bouclier brisé - Matériaux - Throne: Kingdom at War - Guide, la  description, l'aide pour le jeu / Version française

     

    L’Europe sans bouclier : comment les États-Unis exploitent sa faiblesse géopolitique

    Les négociations commerciales entre l’Union européenne et les États-Unis sous l’administration Trump représentent un cas emblématique du déficit de projection stratégique de l’UE sur le plan géopolitique. Face à la menace de droits de douane américains, Bruxelles a opté pour une approche défensive, marquée par la volonté de contenir l’affrontement plutôt que de l’orienter. Cette attitude a mis en évidence trois limites structurelles: le manque d’unité politique entre les États membres, l’incapacité à exercer une pression symétrique sur Washington, et une dépendance générale au marché américain dans des secteurs clés.

    Plutôt que de répondre avec un plan d'action autonome, l’UE a fini par accepter des conditions imposées, sacrifiant une partie de sa crédibilité internationale en tant qu’acteur systémique. Cet épisode remet en question la cohérence entre son poids économique et son influence géopolitique effective, relançant le débat sur la capacité réelle de l’Union à s’affirmer comme puissance régulatrice et non seulement normative.

    Fragmentation européenne: une limite systémique

    La réaction des États membres à l’imposition des droits de douane américains a révélé le manque de cohésion interne. L’Allemagne, principal exportateur d'automobiles vers les États-Unis, a adopté une ligne souple pour protéger sa base manufacturière. La France, au contraire, a prôné une approche plus assertive, mettant en garde contre le risque d’un précédent déstabilisant pour l’ensemble du système commercial multilatéral. L’Italie a alterné déclarations ambiguës et positions tactiques. Ces divergences ont miné la crédibilité de négociation de la Commission européenne, entravant l’élaboration d’une ligne commune.

    Comme l’a souligné le Financial Times, ce désalignement a contraint Bruxelles à agir avec prudence, sacrifiant la force et la clarté de la négociation au nom d’une unité politique fragile. L’accord qui en a résulté est apparu davantage comme une synthèse des compromis internes à l’Union que comme une stratégie tournée vers l’extérieur.

    Ces fractures politiques et stratégiques ont été habilement exploitées par Washington, qui a su jouer sur les intérêts divergents pour obtenir des concessions significatives. L’absence de leadership partagé, conjuguée à l’absence d’un mécanisme décisionnel rapide et efficace en matière de politique étrangère et commerciale, a empêché l’Union de transformer sa puissance économique en influence géopolitique concrète.

    L’asymétrie structurelle des relations transatlantiques

    La négociation a également mis en lumière l’asymétrie structurelle qui caractérise les relations transatlantiques. Les États-Unis continuent à exercer une supériorité stratégique multidimensionnelle, fondée sur la primauté militaire, la domination de leurs chaînes de valeur mondiales et une grande capacité de pression diplomatique. L’UE, au contraire, demeure un acteur fonctionnellement dépendant : sur le plan énergétique, industriel et sécuritaire. La négociation ne s’est pas réduite à une simple question commerciale: l’Europe s’est vue imposer une série d’engagements géostratégiques, parmi lesquels l’achat de gaz, de pétrole et de puces pour l’IA pour une valeur d’environ 750 milliards de dollars, en plus de 600 milliards de dollars d’investissements européens aux États-Unis, et l’achat potentiel d’équipements militaires américains.

    L’UE apparaît ainsi dépourvue de « bouclier stratégique » autonome: comme l’a observé le commissaire européen au commerce Maroš Šefčovič, l’accord a relancé l’idée selon laquelle « il ne s’agit pas seulement de commerce, mais aussi de sécurité, de l’Ukraine, de l’actuelle volatilité géopolitique ». Cette réflexion suggère que l’Union aurait pu négocier différemment si elle n’avait pas ressenti le besoin du soutien américain pour la défense de Kiev.

    Ces clauses extra-commerciales renforcent une position subordonnée de l’UE, désamorçant les leviers traditionnellement disponibles et confirmant son éloignement d’une véritable autonomie stratégique. L’Europe reste donc plus réactive que proactive, incapable de se tailler un rôle central dans les transformations de l’ordre mondial.

    Un accord instable et désavantageux

    L’accord commercial signé il y a quelques semaines repose sur une réduction partielle des droits de douane américains sur certains produits européens, en contrepartie de concessions structurelles de l’UE dans les domaines énergétique, industriel et réglementaire. Il s’agit d’un compromis déséquilibré et voué à l’échec, construit sur un équilibre précaire et dépourvu de garanties contraignantes.

    Les droits de douane américains restent en vigueur sur des secteurs stratégiques comme l’acier et l’automobile, tandis que l’UE s’est engagée à accroître l’importation de GNL en provenance des États-Unis et à adapter certaines normes environnementales afin de faciliter les exportations américaines vers le Vieux Continent. Tout cela se fait sans mécanisme efficace de vérification ou de révision éventuelle de l’accord. L’accord ressemble plus à une trêve temporaire qu’à un partenariat stable: un choix tactique qui permet de gagner du temps politique, mais qui ne résout pas les problèmes structurels de la relation. Le risque est que l’accord soit renégocié unilatéralement par Washington dès que les équilibres internes et externes le permettront.

    L’autonomie stratégique européenne : une promesse non tenue

    Ces dernières années, Bruxelles a fait de l’autonomie stratégique l’un des piliers rhétoriques de sa politique étrangère, commerciale et de défense. Pourtant, la crise des droits de douane a mis en évidence l’écart profond entre la dimension symbolique de cette ambition et la réalité des rapports de force. En l’absence de politique industrielle commune, de capacité militaire autonome et d’instruments économiques de dissuasion, l’Union a adopté une posture attentiste et conciliante.

    L’accord commercial a confirmé la centralité géopolitique des États-Unis dans le système européen, rendant manifeste la difficulté de l’UE à concevoir et mettre en œuvre une stratégie de long terme qui ne dépende pas d’un soutien extérieur. La promesse d’autonomie reste donc un horizon théorique, plus qu’une réalité opérationnelle.

    À la lumière de ces dynamiques, l’épisode représente plus qu’un simple revers diplomatique : il est le symptôme d’une crise d’efficacité stratégique. Si l’Union européenne entend se positionner comme un acteur géopolitique autonome, elle devra se doter non seulement d’une vision partagée, mais aussi des outils matériels, institutionnels et politiques nécessaires pour la traduire en réalité. Sinon, elle continuera à osciller entre des ambitions affichées et une subordination systémique.

    Diego Marenaci (Euro-Synergies, 9 septembre 2025)

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  • La « sud-américanisation » de l'Europe...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Andrea Zhok cueilli sur Euro-Synergies et consacré à la dernière capitulation européenne face aux droits de douanes imposés par les Etats-Unis.

     

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    La « sud-américanisation » de l'Europe

    Après l'accord dûment genuflexé d'Ursula von der Leyen devant le président Trump, même certains des traditionnels gobe-tout pro-européens des journaux italiens Repubblica/Corriere ont commencé à avoir des doutes.

    Ce qui plane à l'horizon serait-il l'oiseau padulo* ?

    Cette soupe brunâtre et malodorante qu'on m'a servie pendant des années serait-elle vraiment ce qu'elle semble être ?

    Mais ce n'est qu'un moment furtif d'incertitude.

    Ils se reprennent rapidement et s'emportent, prêts à réclamer « plus d'Europe ! », « plus de productivité ! », « plus de compétitivité ! » et « moins de gaspillage ! ». Nous avons vécu au-dessus de nos moyens, bordel !

    La solution pour cette génération de pauvres idiots est toujours la même: une dose supplémentaire de la même recette prônée depuis des décennies et qui nous a menés droit dans le mur. Mais cette fois, on va y aller à fond !

    Bon, ce groupe social de béotiens représente peut-être 25% de la population, mais il constitue la garde prétorienne qui défend le bastion du pouvoir réel, celui qui nous met en pièces. Ces gens-là ne jouissent d'aucun privilège particulier, ils ne participent pas au partage des prébendes entre les oligarchies, mais, se nourrissant comme de petits pélicans des régurgitations idéologiques des élites, ils les défendent bec et ongles, accusant les critiques avec l'arsenal habituel (souverainistes, populistes, communistes, fascistes, rouges-bruns, complotistes, etc. etc.).

    Quand on regarde von der Leyen et qu'on se plaint d'avoir assisté à une « capitulation », on dit une chose en partie juste, mais en partie seulement. Il n'y a pas eu de capitulation ici, dire cela c'est une tromperie, car les intérêts que l'on voulait protéger ont été protégés.

    Pour parler de capitulation, il faudrait supposer que von der Leyen, Kallas, Meloni, Picierno, Lagarde (à propos : girls power !) sont là pour représenter les intérêts européens.

    Mais c'est là une erreur totale.

    Ces personnes sont membres d'une élite restreinte qui évolue en étroite collaboration avec les grandes oligarchies économiques transnationales (celles qui, entre autres, contrôlent l'information), dont les intérêts sont tout simplement totalement indépendants de ceux des peuples européens.

    Puis, au fur et à mesure, selon l'intérêt particulier qui aura été promu, on mettra la pièce dans le jukebox d'un économiste à la petite semaine qui vous expliquera avec autorité comment servir les intérêts de telle ou telle multinationale est exactement dans votre intérêt en tant qu'ouvrier, employé, professeur, barbier, etc.

    Faites confiance aux experts et payez, sans discuter.

    Ce qui se passe en Europe n'est pas une « capitulation », mais un processus bien connu, un processus qui a été observé pendant longtemps en Amérique latine, où des oligarchies restreintes ont conservé des positions extrêmement privilégiées en occupant les carrefours par où passent les trafics cruciaux avec les États-Unis.

    Dans le langage marxiste (qui continue de fournir des outils utiles, malgré la mauvaise réputation qu'il a acquise), on opposait la « bourgeoisie nationale » à la « bourgeoisie compradora » (comprador bourgeoisie). Alors que la bourgeoisie nationale, tout en restant évidemment attachée à ses intérêts de classe, agissait en conservant un intérêt pour la prospérité de son pays (et donc, peut-être de manière indirecte, en procurant certains avantages à l'ensemble de la population), la bourgeoisie compradora joue le rôle d'agent pour des organisations étrangères, généralement multinationales, en promouvant leurs investissements locaux et en négociant leurs revenus. Le PDG de la filiale italienne d'une multinationale pharmaceutique, le « promoteur » immobilier international résidant à Milan, etc. ne dépendent en aucune mesure de la santé économique et sociale de l'Italie pour leur bien-être économique.

    Mais ce sont précisément ces personnes qui sont représentées par Ursula-au-heaume-d'or dans les forums internationaux.

    Le résultat naturel de ce processus de « sud-américanisation » est la destruction de la classe moyenne et la création d'une élite économique qui vit en fait au-dessus des lois (car lorsque les différences économiques sont énormes au sein d'une société, tout le monde est susceptible d'être soumis à un chantage et le pouvoir économique se transforme sans difficulté en tout autre pouvoir).

    Bien sûr, si quelqu'un remarque que l'existence d'une bourgeoisie ayant des intérêts nationaux, d'une politique attentive à la souveraineté économique ou d'une société préservant une certaine identité culturelle, même si ce n'est pas le paradis sur terre, vaut mieux que d'être démembré par des oligarchies lointaines, les chiens de guerre des journaux et des universités se déchaînent immédiatement, prêts à se remplir la bouche d'accusations de « souverainisme », de « nationalisme », de « chauvinisme », etc.

    Avec la garde prétorienne de ces 25 % de semi-cultivés qui se jettent sur les malheureux au moindre signal.

    Et rien ne se passe, tout va bien comme ça.

    Épargnez-nous seulement les mises en scène affectant la surprise face au fait que « les intérêts européens n'ont pas été pris en compte », que « c'est une capitulation inattendue », etc. Non, c'est la seule direction claire et manifeste dans laquelle nous allons depuis des décennies.

    Alors retournez donc vous occuper de vos broutilles quotidiennes, le pilote automatique fonctionne très bien.

    Andrea Zhok (Euro-Synergies, 12 août 2025)

    * D'après le site italien Nonciclopedia, "le padulo (communément appelé « celui qui te met dans le cul dès que tu te retournes ») est un animal qui existe à la fois sous forme de poisson et sous forme d'oiseau"...

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  • UE : Orban veut relancer la fronde...

    Le 10 juin 2025, dans son émission sur TV Libertés, Chocs  du monde, Edouard Chanot recevait Thibaud Gibelin, chercheur au Mathias Corvinus Collegium de Budapest, pour évoquer la volonté de Viktor Orban d'organiser une union des États souverains pour renverser l’ordre établi au sein de l’UE...

     

                                              

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  • Fabrice Leggeri : "L’UE a encouragé l'arrivée de millions de migrants !"

    Le 17 mai 2025, Garen Shnorhokian recevait, dans la matinale de Frontières, Fabrice Leggeri, ancien directeur de Frontex et eurodéputé du RN, pour évoquer avec lui  la politique migratoire de l'Union européenne.

     

                                             

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  • Rodrigo Ballester : « L’UE se transforme en monstre centralisé »

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien, cueilli sur Breizh-Info et donné par Rodrigo Ballester du directeur du Centre d’études européennes du Mathias Corvinus Collegium, à l'occasion de la publication d'un rapport, dont il est le co-auteur et qui propose de ramener l’Union européenne à ses racines, en rétablissant la souveraineté de ses États membres. 

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    Rodrigo Ballester : « L’UE se transforme en monstre centralisé »

    Le rapport dresse un bilan accablant de l’évolution de l’Union européenne, qui est passée d’une coopération de nations souveraines à une entité supranationale, les institutions de l’UE s’immisçant dans les affaires intérieures des États membres de l’UE. Où est-ce que tout a mal tourné ?

    Rodrigo Ballester : À Maastricht. La tendance que nous décrivons dans le rapport a commencé avec Maastricht. Il y a en gros trente ans que l’Union européenne a commencé à penser politiquement. Le programme fédéraliste, et tous les problèmes qui en découlent, a commencé très, très clairement à Maastricht.

    Le rapport indique que l’UE devrait revenir à son modèle de 1957, à une UE plus forte et ancrée dans la souveraineté nationale. Mais vous dites que les vrais problèmes ont commencé en 1993, lorsque le traité de Maastricht est entré en vigueur ?

    Rodrigo Ballester : Le projet initial n’était pas du tout comme le projet de Maastricht. Le projet initial était très pragmatique. Il respectait beaucoup les États membres, tant leur souveraineté que leurs différences culturelles. Et cela a duré très, très longtemps. Prenez l’Irlande, par exemple. Jusqu’à récemment, il était difficile d’obtenir le divorce. Personne n’en parlait vraiment. C’était accepté comme étant le point de vue de l’Irlande. Imaginez ce qui se passerait maintenant si, par exemple, la Hongrie interdisait le divorce ? Bruxelles deviendrait complètement folle.

    L’Union européenne est devenue un cheval de Troie idéologique, une entité centralisée qui veut imposer beaucoup de choses, y compris l’idéologie, de haut en bas. Ce n’était pas le cas il y a soixante-dix ans, ni même il y a trente-cinq ans. Le pragmatisme et le respect des identités et de la souveraineté nationales ont été remplacés par une intégration excessive et la création progressive d’un monstre centralisé qui ne sert plus les intérêts des États membres ni de leurs citoyens.

    On pourrait dire que les États membres de l’UE ont accepté cela.

    Rodrigo Ballester : En effet, la majorité des États membres sont satisfaits de cette nouvelle Union européenne centralisée. Ils sont prêts à renoncer à encore plus de leur souveraineté. C’est surtout vrai en Europe occidentale. Pourquoi ? Je pense que lorsque vous commencez à éroder la souveraineté des États membres, ils s’y habituent. Ils trouvent très confortable de déléguer le travail à l’Union européenne, en particulier à la Commission européenne. Cela a été très évident au cours des cinq dernières années. Ils se sont lentement habitués à ne pas avoir à prendre de décisions et à ne pas être traités comme des adultes.

    La majorité des pays d’Europe occidentale ont accepté beaucoup de choses qui ne sont même pas incluses dans les traités, des législations pour lesquelles l’UE n’a aucun mandat, et toutes sortes d’idéologies. Les élites occidentales qui ne partagent pas le passé tragique des pays d’Europe centrale et orientale, et qui n’ont pas connu le communisme et la dictature, sont beaucoup plus enclines à adhérer à ce programme mondialiste, avec une certaine naïveté et arrogance.

    Est-ce la raison pour laquelle il semble toujours y avoir peu de résistance de la part des États membres concernant certaines décisions ? On entend rarement parler de veto national lorsque l’unanimité est requise, ou de voix dissidentes lorsqu’une majorité qualifiée est nécessaire. La Hongrie a été sous les projecteurs ces dernières années pour avoir opposé son veto à certaines décisions de l’UE, par exemple sur l’Ukraine, mais sinon, peu d’exemples viennent à l’esprit. Même le fameux Pacte sur l’immigration a été adopté à la majorité qualifiée, et très peu de pays s’y sont opposés.

    Rodrigo Ballester : Parce qu’ils ne sont plus les principaux acteurs de l’Union européenne, et ils semblent l’avoir accepté. Ils négligent leurs propres devoirs et laissent lentement les décisions être prises par quelqu’un d’autre. La majorité des États membres ne veulent plus être traités comme des adultes. Ils sont heureux de renoncer à ces compétences et de sacrifier leur souveraineté nationale. Par pur confort.

    Donc le traité de Maastricht a essentiellement permis à la Commission européenne et au Parlement européen de prendre les choses en main ?

    Rodrigo Ballester : Oui, exactement. Et cette tendance a été confirmée par le traité d’Amsterdam, le traité de Nice et le traité de Lisbonne. Mais le point de rupture dans les soixante-quinze ans d’intégration européenne est sans aucun doute Maastricht. Les problèmes de l’Union européenne en matière de migration viennent de Maastricht. La zone euro est également un produit de Maastricht. Les politiques de l’État de droit viennent également de Maastricht. Ce grand saut de l’économie à la politique, du niveau intergouvernemental au niveau fédéral, tout cela a ses origines au même endroit.

    Comme vous le mentionnez dans votre rapport, les institutions de l’UE s’immiscent désormais dans des domaines qui devraient relever des compétences des États-nations, tels que l’énergie ou le droit de la famille. Par exemple, la Hongrie a été ostracisée et même traduite en justice pour avoir adopté une loi sur la protection de l’enfance qui interdit la propagande LGBT dans les écoles. La Cour de justice des Communautés européennes prend régulièrement le parti des institutions de l’UE contre les États membres, et rend tout aussi régulièrement des verdicts conformes aux politiques libérales de gauche, dans ce que votre rapport appelle « l’activisme judiciaire ». Les États membres ont-ils un moyen de se défendre contre les abus de l’UE ?

    Rodrigo Ballester : L’unanimité est l’arme la plus immédiate dont ils disposent. Alors que beaucoup à Bruxelles veulent s’en débarrasser, notre rapport recommande de la prolonger. Nous croyons vraiment que l’Union européenne est beaucoup plus forte lorsque les États membres peuvent défendre leurs droits et leurs lignes rouges. Le seul mécanisme qui permet à la Hongrie de se défendre encore contre les tendances autocratiques de l’UE est l’unanimité. L’État de droit combiné à la conditionnalité du budget sont des instruments politiques de chantage. Il suffit de regarder le cas de la Pologne pour ne pas en tirer d’autres conclusions. Ils ont confisqué les fonds de l’UE à la Pologne pendant des années, et dès qu’ils ont changé de gouvernement, en quelques mois, sans aucun engagement législatif, ils ont débloqué l’argent. L’Union européenne transforme le budget européen en un instrument politique qui peut être utilisé contre les pays qui ne se comportent pas « comme il faut ». C’est pourquoi l’unanimité est très importante.

    Votre rapport propose la mise en place d’un « bouclier national des compétences ». Comment cela fonctionne-t-il ?

    Rodrigo Ballester : Il s’agit d’une liste de compétences dans lesquelles l’Union européenne ne pourrait en aucun cas s’immiscer, même par l’intermédiaire de la Cour de justice européenne, car elle le fait tout le temps. Elle l’a fait le 13 mars, par exemple : elle a publié un arrêt qui oblige la Hongrie à reconnaître l’identité de genre perçue d’un migrant iranien : une femme qui s’identifie comme un homme. Comme les autorités hongroises ne la reconnaissent pas comme un homme, elle a saisi la justice. La Cour européenne a alors eu recours à une technique classique : elle a pris une législation européenne, le RGPD, le règlement général sur la protection des données [qui donne aux personnes le droit de corriger les informations inexactes les concernant] et l’a utilisée comme un cheval de Troie pour imposer son idéologie aux États membres. La Hongrie et tous les autres pays de l’UE sont désormais légalement tenus de reconnaître l’identité perçue. C’est quelque chose qui va totalement à l’encontre de la constitution hongroise et de ce que pense la grande majorité des Hongrois et probablement des Européens. Bien qu’elle n’ait aucune compétence dans ce domaine, l’UE a néanmoins réussi à imposer son idéologie. Il s’agit donc d’un chantage politique et d’un détournement politique des compétences nationales.

    Les institutions de l’UE invoquent régulièrement la nécessité de défendre les « valeurs de l’UE » lorsqu’elles traitent avec des États-nations dissidents. Des décisions de justice comme celle mentionnée ci-dessus pourraient-elles créer un dangereux précédent ?

    Rodrigo Ballester : L’article 2 du traité sur l’Union européenne est une liste de coquilles vides, de concepts très vagues et génériques. Selon la Cour de justice des Communautés européennes, le principe de non-discrimination signifie que vous devez reconnaître l’identité perçue. Donc, si le prochain réfugié iranien s’identifie comme une licorne, vous devez également l’accepter. Et donc, oui, c’est le danger avec ces valeurs. Ce sont des coquilles vides qui donnent beaucoup de pouvoir aux bureaucraties centralisées comme l’Union européenne. Et le meilleur exemple est la loi hongroise sur la protection des mineurs, car avant de se demander si l’on aime ou non cette loi, la toute première question devrait être : est-ce une compétence européenne ? Ce n’est pas le cas, car le droit de la famille et l’éducation sont des compétences nationales. Pourtant, au nom du principe de non-discrimination, ils réécrivent les traités. Il en va de même pour l’exclusion des universités hongroises des programmes Erasmus et Horizon de l’UE. Cela ne les regarde pas. Ce n’est pas à l’UE de dire comment une université hongroise doit être organisée. Mais au nom de l’État de droit, ils peuvent faire ce qu’ils veulent.

    Comment votre rapport propose-t-il de résoudre ce problème ?

    Rodrigo Ballester : Nous avons plusieurs propositions, telles que l’extension de l’unanimité dans la prise de décision, l’établissement du « bouclier de compétences nationales », la garantie de distinctions claires entre les compétences de l’UE et des États membres, qui fait quoi, et surtout, la mise du Conseil européen au-dessus de toutes les autres institutions, y compris la Cour de justice. S’il y a un conflit de compétences entre l’UE et les États membres, je ne pense pas que ce soit aux juges de décider. Les traités devraient également indiquer clairement que le droit européen ne devrait jamais, au grand jamais, avoir la primauté sur les constitutions nationales.

    Le rapport mentionne que le Parlement européen et les dirigeants franco-allemands ont appelé à une plus grande fédéralisation de l’Union européenne et à des réformes visant à centraliser le pouvoir au sein des institutions supranationales. L’Allemagne et la France, les deux États membres les plus puissants, sont-elles essentiellement responsables de l’évolution de l’UE ?

    Rodrigo Ballester : Le problème, c’est que la faiblesse de Paris et de Berlin s’est traduite par un renforcement de Bruxelles. Par exemple, lorsque Donald Trump a prêté serment en tant que président des États-Unis en janvier, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, était malade depuis une semaine. Il y a eu une certaine panique, et tout le monde attendait de la Commission qu’elle prenne des décisions, comme si elle était aux commandes. Mais ce n’est pas le cas, et ce ne devrait pas être le cas. La Commission européenne devrait être un secrétariat général au service des États membres, elle devrait être le porte-plume, pas le patron. Le fait que tout le monde ait paniqué à l’annonce de l’absence de Mme von der Leyen montre que de nombreux États membres ne prennent pas au sérieux leur propre souveraineté et leurs propres compétences nationales.

    Le rapport indique que « des décennies de centralisation accrue n’ont pas résolu les défis de l’Europe, mais les ont plutôt exacerbés ». Quel a été l’échec le plus flagrant de l’UE ?

    Rodrigo Ballester : Je dirais la compétitivité et la migration. En termes de compétitivité, nous étions au même niveau que les États-Unis il y a quinze ans. L’écart de PIB est maintenant de 80 %. L’Union européenne est extrêmement bureaucratique, et le Green Deal a contribué à la castration de notre compétitivité. La migration est une compétence européenne depuis au moins deux décennies, et les résultats sont vraiment médiocres. Contrôlons-nous mieux nos frontières ? Non. Y a-t-il moins de criminalité ? Non. Les États membres sont-ils plus habilités à contrôler et à gérer les flux migratoires ? Absolument pas. Cela a été un fiasco. L’une des choses que nous avons proposées est d’utiliser le principe de subsidiarité qui veut que les décisions soient prises au niveau le plus adéquat. Nous pouvons voir que le niveau européen n’est pas le bon pour la migration. Il est temps que les États membres reprennent le pouvoir dans certains domaines, tels que la gestion des frontières et l’asile. L’un des dogmes fédéralistes est qu’une fois que vous cédez vos compétences à l’Union européenne, elles y restent pour toujours. Nous pensons que le contraire est vrai. Nous pensons que, selon le principe de subsidiarité, si l’UE n’est pas le pouvoir adéquat au niveau adéquat, alors vous devriez revenir aux États membres.

    Selon votre évaluation, dans quelle direction l’UE se dirige-t-elle actuellement ?

    Rodrigo Ballester : Cette question est très pertinente depuis le 20 janvier, depuis le début du tsunami Trump. Je savais que l’Union européenne serait rebutée par la victoire de Trump, mais je suis déçu qu’elle utilise le peu d’énergie qui lui reste pour affronter un allié historique au lieu d’essayer de trouver un nouveau type de partenariat avec lui. Je suis choqué, par exemple, que l’UE ne soit pas du tout constructive en ce qui concerne les pourparlers de paix entre l’Ukraine et la Russie. Les élites européennes tentent avec arrogance de construire une nouvelle alliance sans les États-Unis, ce qui est absolument irréaliste. Elles sont offensées et, au lieu de se pencher sur les menaces réelles, elles se lancent dans une croisade contre un ennemi imaginaire qui est en réalité leur plus puissant allié. Cependant, il existe une menace bien plus grande : l’islamisme. J’aimerais voir l’UE combattre l’islamisme avec 10 à 20 % de l’énergie qu’elle consacre à s’opposer à l’administration Trump. L’UE se comporte comme des adolescents, et c’est l’un des grands problèmes actuels en Europe : il n’y a pas d’adultes dans la pièce.

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